Poisson et nutrition : utile et agréable !
Epidémiologie et santé
En France, les enquêtes épidémiologiques (études médicales qui mettent en parallèle les habitudes de consommation et les paramètres santé) ont montré que la première cause de mortalité était les maladies cardio-vasculaires (infarctus, athérosclérose, hémorragie cérébrale). C’est véritablement le mal du monde moderne et de l’opulence. Les artères se bouchent et s’abîment à cause du tabac, du manque d’exercice et surtout, du fait d’une alimentation pléthorique : trop de graisses saturées (graisses cachées, graisses animales) et pas assez de graisses poly-insaturées (graisses de poisson).
Comment s’y retrouver dans les graisses ?
L’alimentation met à notre disposition trois types de graisses, tous les trois indispensables. En effet, nous avons besoin de ces trois catégories de matières grasses pour construire les membranes cellulaires, le cerveau et le tissu nerveux, pour fabriquer certaines hormones, et pour nombre de fonctions encore.
Les nutritionnistes préconisent de consommer autant des unes que des autres, soit parmi les 30 % de graisse qui doivent constituer notre ration énergétique, un tiers sous forme de graisses saturées, un autre tiers sous forme mono-insaturée et le dernier tiers sous forme poly-insaturée.
Où les trouve-t-on ?
Parlons des plus rares et donc, des plus précieuses, celles qui nous font souvent défaut : les graisses poly-insaturées. Ce sont elles qui contribuent à la fluidité des membranes cellulaires, qui permettent la fabrication du cerveau et qui équilibrent les lipides circulant dans le sang. On retrouve dans cette catégorie des “ noms ” célèbres comme acide linoléique, acide alpha-linolénique, présents dans les huiles végétales non-hydrogénées comme celles de tournesol, de soja, de colza, de noisette ou de noix.
Encore plus rares, les acides gras “ super essentiels ” comme l’EPA (acide écosapentaénoïque) ou le DHA (acide docohéxaénoïque), nommés parfois Oméga 3, se trouvent seulement dans les graisses des poissons et dans le lait maternel.
Nous n’avons donc guère le choix : ces graisses sont d’abord indispensables pendant la croissance du cerveau (donc durant la grossesse et jusqu’à l’âge de 2 ans) puis, pour entretenir et renouveler nos membranes cellulaires tout au long de la vie. Consommer des poissons “ gras ” ou des huiles de poisson est donc un gage d’équilibre.
Graisses marines ou terrestres ?
Habituellement, on classe les poissons en trois catégories, les maigres, les demi-gras et les gras. N’oubliez pas toutefois que les poissons les plus gras peuvent être moins gras que les viandes !
Bar, cabillaud, daurade, églefin, lieu, limande, lotte, merlan, plie, raie, sole, tacaud, thon blanc ou rouge | Poissons maigres, moins de 3 % de matières grasses |
Poulet sans peau | 4% de matières grasses |
Anchois, espadon, grondin, mulet, roussette, certains thons | Poissons demi-gras, entre 3 et 6 % de matières grasses |
Anguille, hareng, maquereau, rouget barbet, sardine, turbot | Poissons demi-gras, entre 3 et 6 % de matières grasses |
Anchois, espadon, grondin, mulet, roussette, certains thons | Poissons demi-gras, entre 3 et 6 % de matières grasses |
Anguille, hareng, maquereau, rouget barbet, sardine, turbot | Poissons gras, plus de 6% de matières grasses |
Poulet rôti, viande de bœuf, steak | 6 % et plus |
Cholestérol
On l’a vu : les poissons représentent de merveilleux atouts pour l’équilibre nutritionnel, et leurs matières grasses, quand il y en a, permettent d’équilibrer les graisses du sang et donc, de diminuer le taux de “ mauvais cholestérol ”. Qu’en est-il des coquillages et des crustacés, habituellement éliminés d’un régime alimentaire permettant de lutter contre le cholestérol ?
Les nutritionnistes préconisent de consommer autant des unes que des autres, soit parmi les 30 % de graisse qui doivent constituer notre ration énergétique, un tiers sous forme de graisses saturées, un autre tiers sous forme mono-insaturée et le dernier tiers sous forme poly-insaturée.
Voici la composition en cholestérol de quelques aliments :
100 g de : | Cholestérol (mg) |
Huîtres | 50 mg |
Homard | 112 mg |
Moules | 100 mg |
Langoustines | 100 mg |
Crevettes roses | 160 mg |
Crevettes grises | 180 mg |
Crevettes Saints Jacques | 90 mg |
Crabe | 100 mg |
Poisson | 50 mg |
Viandes de bœuf | 60 à 80 mg |
Viande d’agneau ou de porc | 80 mg |
Beurre | 250 mg |
Œuf | 500 mg |
Les poissons et les coquillages ne sont pas notablement riches en cholestérol. Ils peuvent donc être consommés sans problème. A noter que le cholestérol est toujours contenu dans les graisses des aliments : il fait donc partie des matières grasses des poissons et des œufs des coquillages – le corail. Il est donc aisé de ne pas le consommer si l’on a encore des craintes.
Protéines et poissons
La principale caractéristique nutritionnelle des poissons, c’est leur richesse en protéines. La chair du poisson contient la même proportion de protéines que les viandes rouges et blanches, parfois même davantage. En effet, plus une viande est grasse, moins elle apporte de protéines.
100 g de poisson cru | 17 à 20 % de protéines |
100 g de viande crue | 15 à 20 % de protéines |
Toutes ces protéines, celles du poisson comme celles de la viande, ont une très bonne valeur biologique, et fournissent tous les acides aminés essentiels.
Poissons et micro-nutriments
Phosphore
De notoriété publique, le poisson est riche en phosphore, et le phosphore, c’est bon pour réfléchir ! C’est vrai : les poissons sont pour la plupart riches en phosphore. Ils en fournissent de 170 à 350 mg pour 100 g de chair crue, ce qui représente 21 à 43 % des besoins quotidiens recommandés. C’est à peu près autant que les viandes, qui en fournissent de 160 à 200 mg pour 100 g de viande crue.
Mais surtout, le phosphore est le principal constituant des os, avec le calcium. N’oublions pas que c’est grâce à lui que nos os sont solides et nous portent. De plus, il rentre dans la constitution des phospholipides, composant important du cerveau et du tissu nerveux. Rien à voir avec la mémoire ou l’intelligence.
Ce n’est cependant pas pour le phosphore qu’il nous faut manger du poisson, d’autant plus que bien des aliments en contiennent et que nous en consommons toujours assez.
Fer
Le poisson, comme la viande, constitue notre principale source de fer. Ce fer d’origine animale (car présent dans l’hémoglobine et la myoglobine des muscles) est assimilable, alors que celui apporté par les végétaux l’est peu. Le fer est au cœur de l’hémoglobine : il contribue donc à la respiration des cellules. Il représente aussi le constituant essentiel des muscles. Les nutritionnistes considèrent qu’il est bien absorbé alors que seulement 25 % l’est véritablement ; il est apporté par des aliments d’origine animale (viande ou poisson). Cela montre bien que le fer est un micro-nutriment rare et précieux. D’ailleurs, il fait souvent défaut aux jeunes enfants, aux femmes et aux personnes âgées.
Les nutritionnistes ont mis en évidence que la vitamine C améliorait son assimilation. Ainsi, consommer du citron avec le poisson est une excellente idée, surtout en ce qui concerne les coquillages, champions pour leur richesse en fer. Les huîtres ou les moules en fournissent 6 à 7 mg pour 100 g, soit 3 à 4 fois plus que la viande rouge !
Vitamines
Comme toutes les produits animaux, les poissons et coquillages représentent une source précieuse de diverses vitamines ; les vitamines B2, B12 et PP notamment se retrouvent en quantités importantes.
Oligo-éléments
Tous les poissons apportent des oligo-éléments et des minéraux : calcium et phosphore, fer, cuivre et zinc. Seuls les poissons marins et les coquillages fournissent en outre de l’iode et de nombreux autres oligo-éléments marins : sélénium, manganèse, cobalt et tous les éléments traces. On recommande les crustacés et les coquillages pour leur teneur en cuivre, en zinc, et en divers oligo-éléments marins.
Poissons et qualité sanitaire
Tous les gastronomes le savent : pour avoir une viande tendre, il faut la laisser “ mûrir ” plusieurs jours après l’abattage. Les propres enzymes cellulaires de la viande sont encore en activité et vont en quelque sorte attendrir peu à peu la viande de l’intérieur, au cours du temps.
Si on conserve la viande dans de parfaites conditions d’hygiène, il est possible de la faire mûrir des jours et des jours, puis de la consommer sans être malade. Les mêmes phénomènes se produisent pour le poisson, avec cette différence qu’une substance toxique est synthétisée au cours de sa maturation. C’est pourquoi un poisson devient tôt ou tard toxique pour l’homme. D’où l’importance de sa fraîcheur lors de l’achat.
Certains indicateurs nous alarment : l’odeur en premier lieu, avec des notes d’ammoniaque fort désagréables. L’apparence du poisson peut mettre aussi la puce à l’oreille : il devient terne, s’opacifie, se tache des marbrures inhabituelles. L’œil devient opaque, les ouïes noires ou brunes, la peau est sèche, le corps est très mou sous le doigt.
Contrôles sanitaires
Tout comme pour les autres produits animaux, la répression des fraudes et les services vétérinaires procèdent fréquemment à des contrôles sanitaires. Ils concèdent des autorisations de vente aux mareyeurs, aux préparateurs de poissons, et aux industriels qui procèdent à leur surgélation. Sur tous les emballages de ces produits apparaissent un sceau et un numéro d’agrément. Vous les verrez également sur les emballages – caisses, bourriches, paniers – dans lesquels voyagent les poissons et les fruits de mer. Exigez-les lors de l’achat.
Parfois, rarement, une alerte est donnée à cause d’un phénomène rare de pullulation de contaminants dans certaines régions marines. Ce sont des micro-organismes – des Dinoflagellés – qui se multiplient anormalement et contaminent tous les êtres vivants du site. Les pêches sont alors interdites jusqu’au retour à la normale.
Quant à la contamination de la chair de poisson par le mercure – accident qui a coûté la vie à de nombreuses personnes au Japon – c’est à chacun de prendre des précautions enfantines : ne jetez jamais de mercure (thermomètre) ou de plomb (piles, vieilles tuyauteries) dans les décharges ou, pire, directement dans la nature. Ces métaux lourds ne peuvent pas être éliminés par le rein. Ils sont concentrés au fil de la pyramide alimentaire pour se retrouver à trop fortes doses un jour. Il importe donc de respecter l’environnement et de participer aux collectes de ces métaux.
Poisson sauvage ou d’élevage ?
On comprend aisément qu’un animal sauvage n’ait pas la même composition corporelle que lorsqu’il est élevé. Le poisson d’élevage n’a pas la même alimentation, il prend aussi beaucoup moins d’exercice et est donc plus gras, moins musclé : il a moins de goût, sa chair n’a pas la même consistance.
Ainsi, vous sentirez la différence qui existe entre un saumon sauvage et un saumon de pisciculture : beaucoup plus ferme et savoureux, il est aussi bien moins gras.
Aujourd’hui, l’aquaculture produit des bars, des turbots, des truites de mer ou d’eau douce, des soles, et la plupart des fruits de mer que nous consommons.
Comment connaître la provenance ?
Conserver le poisson
Le premier mode de conservation des poissons est et a été de les faire sécher. Le cabillaud devient alors morue séchée ; les petits poissons sont séchés entiers. Le salage est une autre méthode de conservation, ancestrale elle aussi. La morue salée, les harengs en saumure, les anchois au sel sont autant de spécialités aujourd’hui peu pratiques à utiliser pour les non-initiés.
Enfin, le fumage est une autre façon de conserver les poissons : surtout employé dans les régions nordiques, là où le bois est abondant, le fumage permet de traiter et de conserver les poissons tout en leur donnant une saveur typique. Souvent, les trois méthodes sont associées : le saumon fumé traditionnel des fêtes de fin d’année, par exemple, est salé à la main, puis fumé et légèrement séché. Ces trois méthodes savamment dosées permettent d’obtenir des saveurs douces ou plus puissantes : maquereau fumé aux poivres, haddock (églefin fumé), truite fumée, anguille fumée et séchée, hareng fumé et séché… La palette de produits est large.
Nutritionnellement, le fumage est une technique qui présente quelques inconvénients car elle dépose sur les aliments des substances nocives pour la santé : les goudrons produits par la fumée sont cancérigènes, et il est recommandé de ne pas trop en consommer.
Les conserveries de poisson font partie du paysage de certaines régions de pêches côtières. Les sardines, mais aussi les maquereaux, les harengs et le thon constituent la majorité de la production. L’appertisation – c’est la mise en boîte métallique puis la stérilisation – permet de préserver la plupart des atouts nutritionnels des poissons, vitamines mises à part.
Dans le cas des sardines, l’appertisation fait bénéficier du calcium de ses arêtes : en effet, les sardines sont placées entières dans les boîtes et la cuisson rend une partie de leur calcium soluble – calcium que nous assimilerons avec la sardine. La qualité nutritionnelle des poissons appertisés est excellente quand il s’agit de produits “ au naturel ”. Dans le cas de produits à l’huile, il est recommandé de choisir une huile d’olive première pression afin de bénéficier des bons acides gras.
Les poissons surgelés
La surgélation permet de conserver un aliment sans rien lui enlever (ni vitamine, ni oligo-élément) et sans rien lui ajouter (ni huile, ni sel). Seule la surgélation permet de préserver la fraîcheur d’un poisson. Sur les bateaux-usines, les poissons sont filetés et surgelés immédiatement. Vous ne pouvez pas trouver plus frais que ces produits-là.
En revanche, sachez utiliser les poissons ou les fruits de mer surgelés : leur chair est en général si fine qu’ils supportent très mal une décongélation mal conduite.
Suivez nos conseils, à moins que vous ne possédiez un micro-ondes :
il ne faut pas décongeler un filet de poisson ou des coquilles Saint-Jacques avant de les cuire : jetez-les directement dans une poêle chaude ;
laissez un poisson entier décongeler dans son emballage, dans le bas du réfrigérateur, pendant une nuit.