Acouphènes : Traitements possibles
Description médicale
Une pulsation, un sifflement, des cliquetis : nous expérimentons tous (ou presque!) dans notre vie de brefs moments où nous entendons des sons dans notre oreille, qui ne parviennent pas de notre environnement.
Des sons que nous sommes donc les seuls à entendre, puisque nous les générons. Cela survient souvent, par exemple, après avoir été exposé à une musique très forte. Ces sons internes disparaîtront généralement d’eux-mêmes, sans intervention. Or, chez certaines personnes, le problème devient chronique, et altère peu à peu la qualité de vie.
Cette sensation auditive anormale se nomme « acouphènes ». On en distingue deux catégories : les acouphènes objectifs et les acouphènes subjectifs.
Les acouphènes objectifs peuvent résulter :
– d’un défaut structurel de l’oreille interne;
– d’une anomalie vasculaire;
– de contractions musculaires répétées.
Ces acouphènes sont parfois tellement bruyants qu’il est possible de les entendre en écoutant directement dans les oreilles de la personne affectée. Ils ne représenteraient que 1 % des cas d’acouphènes.
Dans la plupart des cas toutefois, seuls ceux qui en souffrent peuvent entendre les acouphènes. Il s’agit alors d’acouphènes subjectifs, que la science a, de ce fait, beaucoup plus de difficulté à expliquer et donc à traiter.
De nos jours, les causes les plus fréquentes d’acouphènes sont le déclin des fonctions auditives avec l’âge et l’exposition excessive au bruit.
Description énergétique
Selon la Médecine traditionnelle chinoise (MTC), les causes les plus courantes des acouphènes sont l’attaque d’un « pervers externe » (par exemple, une atteinte virale suivant la médecine occidentale), ou une lésion interne liée aux émotions (colère, préoccupations, peur…), à une alimentation trop riche produisant des mucosités, à une consommation excessive d’alcool produisant du Feu, à des activités sexuelles immodérées, au surmenage physique, etc. Toutes ces causes peuvent produire finalement un blocage de l’oreille interne et causer non seulement des acouphènes, mais aussi la surdité qui en est souvent l’aboutissement final.
Les mécanismes les plus importants qui conduisent à la formation des acouphènes sont la dysfonction du Coeur et du Rein, de sorte que la quintessence ne nourrit pas les orifices supérieurs, la perturbation de la Rate et de l’Estomac empêchant le yang clair de monter et de désobstruer les orifices des oreilles, la congestion du Feu et l’encombrement de l’énergie du Foie qui bloquent les méridiens et les vaisseaux de l’oreille, et l’attaque externe de « pervers » qui se logent dans le méridien Shaoyang, qui contrôle l’oreille.
Dans la pratique clinique, on différencie les cas aigus et les cas chroniques, c’est-à-dire les acouphènes soudains et ceux qui s’amplifient progressivement. Le diagnostic est établi suivant les causes spécifiques, le mécanisme pathologique, la constitution et l’état de santé du patient.
Le diagnostic est rarement simple et unique, car les acouphènes résultent le plus souvent d’un ensemble de pathologies interreliées. Les syndromes rencontrés le plus souvent sont les suivants : le Jing du Rein insuffisant ne monte pas pour soutenir le haut (plus cinq complications), le yang clair ne monte pas (plus quatre complications), la congestion du Qi, des glaires du Feu et de la Chaleur s’encombrent dans les orifices du haut (plus sept sous-syndromes et une dizaine de variations), l’encombrement et le blocage du vent pervers (plus trois complications), le blocage de la stase cause la fermeture et l’occlusion (plus deux sous-syndromes).
Pierre Sterckx, C.M.D.
Symptômes
Les acouphènes se manifestent par divers bruits dans les oreilles – des bourdonnements, des sifflements, des chuintements ou des tintements – qui peuvent être d’intensité, de durée et de modulation variables.
Ces bruits internes peuvent parfois devenir intolérables. En plus de provoquer de l’insomnie, de l’irritabilité et des troubles de la concentration, les acouphènes conduisent parfois à la dépression. Chez les personnes souffrant de cette affection, on a observé une incidence particulièrement élevée de certaines maladies mentales. Des médicaments à visée psychiatrique ou une psychothérapie peuvent alors être appropriés.
Selon leur cause, les acouphènes peuvent s’accompagner d’une perte d’audition, de nausées, de somnolence, de vertiges, de douleur ou de l’impression persistante d’avoir un bouchon dans les oreilles.
N.B. Si la personne entend des voix ou une musique, on parle alors d’hallucination auditive.
Personnes à risque
- Les aînés. Le vieillissement cause souvent une détérioration des fins mécanismes de l’audition, ce qui peut provoquer l’apparition d’acouphènes.
- Les personnes exposées au bruit. Outre les habitants des villes à forte densité de population, sont particulièrement à risque :
– les personnes travaillant en milieu industriel;
– les camionneurs et tous ceux que leur profession oblige à utiliser souvent une automobile;
– les mécaniciens automobile;
– les ouvriers de la construction;
– les musiciens (en particulier, les musiciens rock ou heavy metal), etc.
Les résultats d’une étude épidémiologique menée en Grande-Bretagne auprès de 22 194 adultes ont démontré que le risque de développer un acouphène augmentait proportionnellement au nombre d’années passées dans un milieu de travail où les bruits sont élevés. - Les jeunes. L’incidence des acouphènes chez les jeunes tend à augmenter depuis quelques années, phénomène que les experts expliquent par le fait qu’ils sont exposés à un volume de son élevé lorsqu’ils fréquentent les discothèques, les boîtes de nuit, les salles de concert et les raves. Sans compter que plusieurs écoutent la radio de leur voiture ou de leur baladeur à un volume extrêmement élevé.
Facteurs de risque
Exposition excessive au bruit. L’oreille interne est tapissée d’une multitude de cils vibratoires dont la mission est de faire passer la vibration sonore. Lorsque des sons de forte intensité sont perçus par l’oreille, ces cils vibratoires s’abaissent pour se redresser au bout d’un moment. Toutefois, l’exposition régulière à un nombre trop élevé de décibels (dB) entraîne tôt ou tard des dommages permanents.
« il n’y a aucun risque connu de perte auditive associée aux niveaux sonores inférieurs à 70 dB, peu importe la durée de l’exposition. » L’Organisation mondiale de la Santé mentionne que les pressions acoustiques ne devraient jamais excéder 140 dB pour des adultes, et 120 dB pour des enfants. Voici quelques exemples du nombre de dB qu’une personne peut absorber en moyenne durant une journée.
Un enfant qui passe six heures par jour en garderie – le bruit d’une garderie peut facilement atteindre 75 dB -, et une heure devant le petit écran, qui participe à des activités durant deux heures et dort 11 heures est exposé à une moyenne de 70 dB durant sa journée.
Un adolescent qui écoute une musique trop forte sur son baladeur durant trois heures – ce qui peut équivaloir à 95 dB -, qui fréquente une salle de jeux électroniques durant une heure et qui, le reste du temps, s’adonne à ses activités régulières : aller à l’école, regarder la télévision, dormir, etc., est exposé à une moyenne de 86 dB durant sa journée.
Par ailleurs, il arrive qu’un son particulièrement violent provoque un affaissement irrémédiable des cils vibratoires de l’oreille, pouvant causer une atteinte auditive permanente et des acouphènes.
Quelques mesures en décibels (dB)
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Certaines maladies. L’otite moyenne, la maladie de Paget et la maladie de Ménière peuvent causer des acouphènes puisqu’elles affectent le système auditif. Des atteintes du système vasculaire peuvent aussi être en cause. Par exemple, l’athérosclérose, caractérisée par des dépôts de gras sur la paroi des vaisseaux sanguins, rend les petits vaisseaux qui irriguent l’oreille moins flexibles. Cette perte d’élasticité, fait en sorte que le sang arrive plus brusquement dans l’oreille – on peut donc entendre le sang circuler, par battements. Enfin, la haute pression (et les facteurs qui causent l’hypertension artérielle comme le stress, la consommation d’alcool, de café, etc.) peut aussi rendre les sons internes audibles.
Usage de certains médicaments. Lorsqu’ils sont pris à long terme et à hautes doses, certains médicaments peuvent causer des acouphènes. Voici la liste des principaux médicaments en cause :
– l’aspirine et certains anti-inflammatoires non stéroïdiens;
– la quinine;
– les contraceptifs oraux;
– certains diurétiques;
– divers médicaments utilisés en chimiothérapie;
– des antibiotiques de la famille des streptomycines (dont l’action toxique aux oreilles est reconnue).
Prévention
Attention au bruit. Éviter d’exposer inutilement et trop souvent ses oreilles à des volumes sonores trop élevés ou même moyennement élevés. Au besoin, utiliser des boules Quies, des coquilles protectrices ou des bouche-oreilles en mousse au travail, en avion, durant un concert rock, lorsqu’on travaille avec certains outils bruyants, etc.
On a observé qu’il y avait une certaine corrélation entre le risque de contracter une tumeur bénigne de l’oreille (au vestibule) et l’augmentation de l’utilisation du téléphone cellulaire. Cela demeure controversé dans le milieu médical. Or, ce type de tumeur est cause d’acouphènes.
Faire régulièrement de l’exercice. Étant donné que l’artériosclérose et l’hypertension sont souvent à l’origine des acouphènes, il est certain que la pratique régulière d’exercices cardiovasculaires aura une action préventive.
Adopter de bonnes habitudes alimentaires. Certains aliments peuvent avoir pour effet d’augmenter l’intensité des acouphènes. Sont à surveiller :
– le sel : tout excès de sodium cause simultanément une rétention des fluides et une augmentation du flux sanguin aux oreilles; ce phénomène crée une pression sur l’appareil auditif, ce qui peut provoquer des bourdonnements;
– les graisses : éviter ou supprimer en partie les aliments qui provoquent une augmentation du taux de cholestérol comme les viandes grasses, les jaunes d’œufs, les charcuteries, le beurre, les huiles commerciales ou la margarine fabriquée à base d’huile hydrogénée; en revanche, des huiles riches en graisses insaturées et en acide linoléique, un acide gras essentiel de la famille des oméga-6 (comme l’huile d’olive), sont bénéfiques;
– les allergènes alimentaires : les allergies alimentaires peuvent aussi causer des bourdonnements d’oreilles; certaines personnes peuvent observer une aggravation de leurs symptômes après avoir consommé du chocolat, du lait, du fromage, des produits à base de soya, de l’avocat, des bananes très mûres ou des agrumes;
– les excitants : l’alcool, le café et la cigarette peuvent affecter le nerf auditif et exacerber sa sensibilité; un excès de thé pourrait aussi causer des acouphènes.
Bien gérer son stress. C’est bien connu, le stress est un facteur aggravant – voire causal – des troubles cardiovasculaires ou immunitaires. Si on considère que les acouphènes sont symptomatiques d’un problème de santé, on comprend l’importance d’une bonne gestion du stress comme mesure préventive.
Traitements médicaux
Dans la plupart des cas, il n’existe pas de traitement médical spécifique pour les acouphènes.
Dans le cas où ces derniers seraient liés à une maladie bien identifiée, il est possible d’obtenir une amélioration en soignant la maladie en cause (une otite moyenne, une tumeur de l’oreille, l’otosclérose, la maladie de Paget, la maladie de Ménière, etc.).
L’acouphène peut également être causé par l’utilisation à long terme et à hautes doses de certains médicaments. Le médecin pourra alors proposer de changer la médication ou de modifier le dosage.
Dans les autres cas, on a recours à divers traitements palliatifs.
Masquage de l’acouphène. Les audiologistes utilisent des appareils qui diffusent un « son blanc » (le bruit de vagues, les chants d’oiseaux, etc.), diffusés à faible volume dans l’oreille atteinte, et ayant pour effet de masquer l’acouphène et d’en minimiser les inconvénients pour le patient.
Rééducation de l’ouïe. Au cours de la dernière décennie, les audiologistes ont développé un protocole de traitement qui comprend l’utilisation de « sons blancs », de techniques de relaxation et de diversion de l’attention, ainsi que le counseling psychologique.
Thérapie cognitivo-comportementale. Cette approche psychologique, souvent couplée à la thérapie de rééducation de l’ouïe, semble donner de bons résultats. Elle repose sur des techniques de relaxation, de diversion de l’attention, de visualisation, sur des conseils concernant l’environnement sonore et la gestion du sommeil et sur un remodelage des pensées et croyances au sujet de l’acouphène. Des chercheurs suédois ont même démontré l’efficacité de cette approche auprès de sujets participant à un programme de thérapie cognitivo-comportementale diffusée sur Internet.
Traitements non conventionnels
Phytothérapie
Ginkgo (Ginkgo biloba). La Commission E allemande approuve l’usage interne des extraits de feuilles de ginkgo biloba pour traiter les acouphènes d’origine vasculaire. On pense que l’efficacité du ginkgo dans certains cas d’acouphènes tiendrait au fait qu’il améliore la circulation sanguine dans les capillaires qui irriguent la boîte crânienne. Les résultats des études les plus récentes demeurent toutefois contradictoires. Les auteurs d’une synthèse d’études cliniques publiée en 1999 rapportaient que dans cinq essais cliniques de qualité variable, dont trois seulement ont eu recours à un groupe témoin, le ginkgo a permis de soulager les acouphènes.
Par contre, un essai à double insu avec placebo mené en 2001 auprès de 978 sujets auxquels on avait donné 50 mg de l’extrait de ginkgo LI 1370 n’a pas donné de résultats permettant de démontrer l’efficacité de la plante. Tandis que les résultats d’un autre essai à double insu avec placebo, mené en 2002 avec l’extrait de ginkgo EGb 761 auprès de 60 sujets, ont plutôt permis de démontrer que la plante avait une efficacité significative, mais modérée.
Dosage
Prendre de 120 mg à 160 mg d’extrait (50:1) par jour, en deux ou trois doses.
Actée à grappes noires (Actea racemosa). Cette plante indigène de l’est des États-Unis et du Canada est utilisée depuis une quarantaine d’années en Europe pour traiter les symptômes associés à la ménopause. Se basant sur une série d’études pharmacologiques et d’essais cliniques réalisés dans les années 1980, la Commission E a approuvé son usage pour soulager l’inconfort prémenstruel, la dysménorrhée et les symptômes de la ménopause, dont les palpitations cardiaques, la nervosité, la dépression et les acouphènes.
Suppléments
Mélatonine (pour le sommeil). Une petite étude randomisée et contrôlée a démontré que la mélatonine pouvait apporter un soulagement notable chez les personnes souffrant d’insomnie en raison de leur acouphène. Les 30 participants à l’étude, qui avaient des acouphènes subjectifs, recevaient 3 mg par jour de mélatonine ou un placebo, durant 30 jours.
Vitamine B12. Lors d’une étude menée auprès de 113 militaires, des chercheurs israéliens ont observé que 57 sujets souffraient d’acouphènes et de perte de l’audition causés par le bruit excessif et que, parmi ces derniers, 47 % étaient carencés en vitamine B12. À la suite de l’administration de vitamine B12, douze d’entre eux ont connu une diminution de leurs acouphènes. Les auteurs de l’étude souhaitent que le taux de vitamine B12 dans le sang des personnes qui souffrent d’acouphènes chroniques soit évalué.
Zinc. En 1987, des chercheurs belges annonçaient avoir établi une corrélation significative entre la carence en zinc et le développement d’acouphènes, et qu’une supplémentation en zinc pouvait soulager les symptômes dans 52 % des cas. Le rôle du zinc dans cette pathologie n’est toutefois pas bien connu, et certaines personnes ayant des acouphènes ne présentent pas de déficience en zinc. Les résultats des études sont donc variables, certains démontrant que les suppléments de zinc améliorent les symptômes, alors que d’autres n’observent aucun bénéfice.
Approches thérapeutiques
Hypnothérapie ou autohypnose. Cette thérapie aurait une efficacité comparable ou supérieure au counseling psychologique et aux interventions de masquage de l’acouphène pour réduire les acouphènes subjectifs. Trois études cliniques randomisées et contrôlées impliquant 177 sujets obtiennent des résultats encourageants, d’après cette source.
Approches à considérer
Médecine traditionnelle chinoise
Acupuncture. Bien que l’acupuncture soit encore populaire auprès de nombreuses personnes souffrant d’acouphènes, les résultats de la plupart des essais cliniques menés à cet effet n’ont pas permis d’établir son efficacité.
Pharmacopée chinoise. Toutefois, un praticien de la Médecine traditionnelle chinoise pourra prescrire certaines préparations destinées à traiter des syndromes auxquels les acouphènes sont associés. Par exemple, la préparation Tian Ma Gou Teng Yin Wan, destinée au traitement de l’hypertension artérielle, pourra contribuer à vous débarrasser d’un acouphène causé par ce trouble physiologique, tandis que Da Zao Wan et Liu Wei Di Huang Wan, qui traitent normalement plusieurs inconvénients associés à la ménopause, pourront également soulager certains acouphènes.
Chiropractie, ostéopathie et thérapie craniosacrale. En cas de dislocation de la mâchoire ou du cou, ces approches pourraient aider à soulager les acouphènes. Ces thérapies sont donc davantage indiquées lorsque les acouphènes résultent d’un problème structurel. Consulter ces fiches du Guide des thérapies : chiropratique, ostéopathie, thérapie craniosacrale.
Gestion du stress. Éviter l’excès de stress n’est pas seulement une façon de prévenir l’apparition des acouphènes à long terme, mais aussi un très bon moyen de ne pas aggraver ce problème, s’il existe déjà. Il est vrai qu’il peut être difficile de relaxer avec les acouphènes. Pour mieux gérer le trop-plein de stress, il est possible de s’inscrire à des cours de yoga ou de technique Alexander. C’est un bon moyen de se familiariser avec différentes techniques de relaxation et une composante importante du traitement, d’après le Dr Andrew Weil. Des massages réguliers peuvent aussi apporter un certain soulagement.