Un corse mourant et sa progéniture
Un vieux corse se meurt dans son lit, au premier étage de la maison, pendant que ses trois fils attendent, en silence, dans la grande pièce du rez-de-chaussée. Sentant que sa fin approche, il décide de régler les problèmes d’héritage et crie :
– Dominique ! Monte !
Le fils aîné grimpe quatre à quatre au chevet de son père, qui lui dit :
– Ecoute petit, je ne suis pas bien riche. Je n’ai que la maison, les garrigues, et mes quelques chèvres. On ne peut pas couper ça en trois ! Alors, j’ai décidé de tout donner à celui d’entre vous qui symbolisera le mieux l’esprit corse, au plus paresseux des trois. Je vais faire un test. Suppose, petit, que tu sois sur la place du village. Tu n’as rien mangé depuis deux jours, et le marché est à cinquante mètres. Qu’est-ce que tu fais ?
– Papa, j’attends qu’on m’apporte à manger. Sinon, je meurs de faim !
– C’est bien, petit. Tu peux redescendre.
Il appelle son second fils :
– Antoine ! Monte !
L’autre rapplique dare-dare. Apres lui avoir expliqué qu’il léguera tout ce qu’il possède au plus paresseux de ses trois fils, il ajoute :
– Petit, je vais te faire un test, comme à ton frère. Tu es sur la place du village. Tu n’as pas bu depuis deux jours, et la fontaine, avec de l’eau bien fraîche, est à vingt mètres. Qu’est-ce que tu fais ?
– Papa, j’attends qu’on m’apporte à boire. Sinon je meurs de soif…
– C’est bien, petit. Tu peux redescendre.
Et là, il sent que ses dernières forces l’abandonnent. Alors, dans un effort surhumain, il réussit à appeler son troisième fils.
– Doumé ! Monte !
Et d’en bas l’autre crie :
– Non, papa… Toi, descends !