Explosion des prix en France : TF1 accusé de mépriser les consommateurs
Les Français ont-ils raison de s’indigner face au traitement médiatique de l’inflation ? Un récent reportage de TF1 a provoqué une vague de colère en semblant suggérer que nos difficultés financières ne seraient qu’une question de perception. Analyse d’un malaise qui va bien au-delà du simple fait divers.
Un reportage qui passe mal
Mercredi dernier, le journal de 20h de TF1 présentait un sujet sur l’inflation qui a fait grincer des dents. Le ton employé par la journaliste – « Vous avez l’impression que tout augmente ? » – suivie d’explications techniques sur les « mécanismes psychologiques » de perception des prix, a été perçu par de nombreux téléspectateurs comme une remise en question de leur vécu.
Sur TF1 on nous explique que si on à l'impression que les prix ont explosé dans les magasins, que la vie est plus chère qu'avant et qu'on a du mal à s'acheter à bouffer, c'est que nous sommes des cons.
J'en peux plus d'eux. pic.twitter.com/rAC8dOdYBX— Lili Adresan🌺 (@AdresanSoso) April 18, 2025
« C’est insupportable de nous prendre pour des imbéciles », témoigne Marie, 34 ans, mère de deux enfants. « Entre mon caddie de 2019 et celui d’aujourd’hui, la différence saute aux yeux. Je n’ai pas besoin d’un expert pour me dire que je dois rogner sur l’alimentaire. »
Les chiffres qui démentent le discours
Selon les dernières données de l’INSEE, les prix alimentaires ont bel et bien augmenté de 12% sur un an. Le panier moyen des Français contient désormais :
- 15% de produits premiers prix
- 30% de marques distributeurs
- 55% de produits de marque (contre 75% en 2019)
Pourtant, le reportage insistait sur le fait que « certaines catégories de produits voient leurs prix baisser », sans préciser qu’il s’agissait souvent de biens non essentiels.
Le décalage médias/réalité
Jean-Marc, retraité, résume le sentiment général : « À la télé, on nous parle d’une France qui n’est pas la nôtre. » Ce malaise n’est pas nouveau mais prend une ampleur particulière avec la crise actuelle. Les chaînes d’info en continu multiplient les débats théoriques pendant que les Français comptent chaque centime.
L’économiste Thomas Piketty avait déjà pointé ce phénomène : « Il existe aujourd’hui une fracture entre le discours des élites et la réalité vécue par la majorité. » Un fossé qui se creuse davantage à chaque reportage minimisant les difficultés quotidiennes.
Pourquoi ce sujet fait-il tant réagir ?
Au-delà des chiffres, c’est la forme qui a choqué. Le ton paternaliste, les plans serrés sur des consommateurs « irrationnels », le choix des experts… Tout concourt à donner l’impression d’un mépris de classe.
« Quand j’entends ‘vous avez l’impression que…’, je comprends ‘vous vous imaginez que…' », analyse le sociologue Pierre Lefebvre. « C’est une manière de délégitimer l’expérience populaire. »
Quelles leçons tirer ?
Cette polémique révèle trois enjeux majeurs :
- Le besoin d’un journalisme plus empathique
- L’importance de donner la parole aux premiers concernés
- La nécessité de contextualiser les données économiques
Comme le résume une téléspectatrice : « Nous ne sommes pas fous. Nous vivons simplement une réalité que certains refusent de voir. »