Dans un Wagon
Excellente chute !
Cela se passe dans un wagon de chemin de fer. Cinq personnes. Un couple avec un enfant qui, le pauvre, soyons franc, est vraiment très laid; même plus que laid : carrément hideux.
Il y a aussi un autre couple, très vulgaire, qui casse la croûte de façon très sale : camembert sur la banquette, saucisson qui traîne, litre de rouge qui se répand. Et ce couple, en mangeant, n’arrête pas de parler pour dire :
— Oh dis donc, chérie… T’as vu la tête du môme? Oh… ça c’est quelque chose…
— Oh oui! Quel petit monstre! Hou… Qu’il est vilain !
Cela dure jusqu’à ce qu’ils descendent du train. Les parents de l’enfant poussent alors, évidemment, un soupir de satisfaction et de soulagement. Monte alors un monsieur extrêmement raffiné, costume impeccable, cravate idoine. La classe. Il s’assoit et lit son journal.
« C’est agréable d’avoir en face de soi quelqu’un de bien élevé, plutôt que ces gens vulgaires de tout à l’heure » pensent les parents de l’enfant.
Après avoir lu son journal, l’homme raffiné sort un paquet de biscuits de sa valise, en mange un ou deux, puis en sort un autre du paquet et dit, très poli, très « grand siècle » :
Pardon, Monsieur… Pardon, Madame… Excusez-moi de vous importuner, mais, dites-moi, est-ce que je peux donner un gâteau au petit singe?